Dans un contexte de recul démocratique et de l'état de droit caractérisé par des attaques contre la liberté de la presse, de violations du droit à la liberté d’expression et d’opinion, à la liberté de s’assembler et de se réunir, il est fondamental de savoir et de prendre conscience du fait que communiquer via un réseau de téléphonie mobile nous expose à deux types de surveillance: Une surveillance commerciale et une surveillance sécuritaire voire politique. La surveillance commerciale est faite par les géants du net et principalement par les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) qui collectent des données sur nos activités en ligne en vue de les monétiser. Il est impossible d’y échapper si on utilise un téléphone avec la version Android de Google ou avec iOS d’Apple. La seule solution pour limiter cette surveillance commerciale est, soit de ne pas utiliser un téléphone Iphone ou d’utiliser un téléphone dégooglisé, tels que Lineage, Purism, etc Ce sont des téléphones avec une version d’Android sans les applications de Google qui permettent de traquer les utilisateurs. Il est aussi possible d’échapper à cette surveillance commerciale en utilisant un téléphone avec le système d’exploitation Ubuntu Touch. Ces modèles de téléphone se vendent en Amérique et en Europe, cependant, ils ne sont pas très courants. En Afrique, il est très rare de voir leur commercialisation. Toutefois, il est possible d’installer soi-même sur son téléphone ces systèmes d’exploitation pour une meilleure protection de sa vie privée. La surveillance sécuritaire et politique est faite par un gouvernement pour traquer et surveiller tous ceux qui constituent une menace pour un état ou un pouvoir politique. Il est à noter que tant qu’on utilise un téléphone portable connecté à un réseau de téléphonie mobile, il est impossible d’échapper à la surveillance gouvernementale. Non seulement, le gouvernement peut disposer de la capacité d’écouter les conversations téléphoniques et lire les SMS, mais pire encore, tout utilisateur est géolocalisable. Certes, la localisation géographique par les antennes relais est approximative à moins de mettre en œuvre d’autres mesures techniques, mais elle est beaucoup plus précise avec la 5G. Il faut remarquer, en outre, que si un utilisateur sauvegarde ses contacts dans sa SIM (puce), l’opérateur de téléphonie peut avoir une copie de ses contacts par conséquent le gouvernement peut aussi avoir la liste de tous ses contacts pour mieux le traquer. En effet, il est possible de surveiller un utilisateur à partir des appels qu’il émet mais aussi de ceux qu’il reçoit même s’il utilise un numéro non identifié à son nom. Par conséquent, pour éviter d’être traqué à partir de ses contacts, il ne faut jamais les enregistrer dans une SIM, encore moins acheter le service de sauvegarde automatique des opérateurs, car le gouvernement peut en avoir copie. Il est recommandé de faire la sauvegarde des contacts dans la mémoire du téléphone, et ensuite les copier manuellement dans un disque externe de stockage, par exemple une clé USB. Enfin, si le gouvernement ne peut pas surveiller un utilisateur via les réseaux de téléphonie mobile, il peut placer dans le téléphone d’une personne ciblée un logiciel espion, tel que «Pegasus» developé par la société israellienne «NSO Group». Les cibles principales de ces logiciels d’espionnage sont les téléphones Android et iOS grand public. En sus de leur installation physique, ils peuvent aussi être installés à distance. Un lien par SMS peut être envoyé dans l'espoir qu’il soit cliqué par la cible. D’autres méthodes ne nécessitent aucune interaction de l'utilisateur (Zero click), mais toutes se résument à des vulnérabilités de cette nature. Ainsi donc, le téléphone portable peut devenir un espion dans votre poche qui consigne toutes les activités, échanges de SMS, enregistrement des conversations, positionnement par GPS, historique de navigation Internet, etc. Les réseaux de téléphonie mobile ainsi que le téléphone portable constituent donc des systèmes de surveillance personnalisée et de masse. Il est important d’être conscient à tout instant de cette réalité invisible. La seule solution pour se protéger de cette surveillance gouvernementale est d’utiliser un téléphone sans SIM et faire toutes ses communications via les applications de «Voice over Ip», telles WhatsApp, Signal, Telegram, etc . Toutefois, cette option comporte des limites car tant qu’on a accès à un Wifi on peut communiquer sans difficultés. Mais dès qu’on est en mobilité, un problème d’accès à internet se pose. Et, il n’est pas facile et pratique de devoir toujours être à la recherche d’un Wifi pour pouvoir communiquer. Dès lors, qu’un utilisateur décide pour des raisons de confidentialité mais surtout de sécurité pour sa propre survie de ne plus utiliser les réseaux de téléphonie mobile pour communiquer au profit des applications de messagerie, se pose la question de savoir laquelle choisir. Question d’autant plus opportune qu’il y en a beaucoup. Cependant, WhatsApp étant l’application la plus populaire en Afrique, notre analyse se focalisera sur cette application mais aussi sur les applications Signal et Telegram. Une analyse comparative de ces 3 applications, guidée par 3 indicateurs est effetuée: Un cryptage de bout en bout qui protège le contenu des communications, collecte d’informations appelées métadonnées (Ce sont les informations sur une donnée telle que l’heure du message, la durée, le type de message, envoyé à qui, adresse Ip, numéro de téléphone utilisée, la localisation, les contacts, etc...), et enfin le partage des données avec des tiers.
Enfin, il est important de savoir que WhatsApp et Telegram sont des sociétés commerciales tandis que Signal est une organisation à but non lucratif. La confidentialité des communications numériques est un enjeu de sécurité et de survie pour tout opposant politique, défenseurs des droits humains et journaliste ayant un esprit critique dans un régime autoritaire. Ni WhatsApp, ni Telegram ne la garantissent. A tout moment, avec ces applications tout gouvernement peut savoir qui sont les utilisateurs et ce qu’ils font. La seule application qui protège la vie privée et le secret des communications numériques est Signal. Au regard de tout ce qui précède, ASUTIC recommande fortement à tout opposant politique, activiste, journaliste avec un esprit critique, défenseurs des droits humains et à tout sentinelle de la démocratie dans un régime autoritaire:
Fait à Dakar, le 28/ 05/ 2023 |